Lors de ma prise de fonction en octobre 1950 (année scolaire 1950-1951), succédant à Mr. THIBOUT, j'ai passé les premiers mois à étudier le fonctionnement de chaque atelier existant : programmes, progressions, affectation de chacun, difficultés rencontrées et souhaits exprimés.
Ma secrétaire, Mme. GEMY, en place depuis plusieurs années me facilita la tâche et les chefs d'ateliers furent loyaux et précieux alors qu'il me fallait aussi préparer les cours de technologie générale pour les 3ème, les 2ème, les premières et les terminales!
Dix classes, dix heures de cours, plus les corrections. Fort de mon passage à l'éducation nationale (Lycée Technique de Suresnes) j'avais des données précises du fonctionnement de pareil établissement et les responsabilités que j'avais assumées dans les ateliers aéronautiques soit de construction (SNCAC à Fourchambault, chef bureau études outillages) ou d'entretien - réparation (AIA de Boufarik) me permirent d'avoir rapidement un programme de travail et une méthode de conduite des ateliers.
Ainsi : le but principal de l'E.N.P.A. étant de former des ouvriers, des techniciens spécialistes en aéronautique, je pris contact avec les responsables des AIA au sujet de la définition exacte des spécialités demandées, de leur niveau, de la sanction des connaissances pratiques qu'étaient les essais professionnels.
Chaque établissement avait ses propres normes, ses essais routiniers connus de tous les candidats, peu d'homogénéité et des valeurs très différentes d'un AIA à l'autre.
Lors d'une réunion à la DTRA, il fut convenu d'établir un cahier général des essais, les travaux de préparation ayant lieu de préférence à l'E.N.P.A. et quelquefois dans chacun des AIA (Alger- Blida- Casablannca ).
L'étude des locaux de l'atelier fit ressortir rapidement les besoins non satisfaits et les oublis notoires comme l'absence d'un magasin central d'outillage général et d'un magasin de matières et ingrédients.
Le bureau du chef de travaux ne permettait pas à ce dernier (moi, en l'occurrence...) d'avoir une vue générale sur les sections de réunir les chefs d'atelier pour gérer avec eux le fonctionnement de la formation.
J'avais remarqué que le préau, mal orienté, était inutilisable les jours de mauvais temps et je décidai d'en faire profiter le magasin d'outillage manquant, tout en créant un bureau du chef des étage, tout vitré avec une vue générale correcte sur les ateliers.
Pour une raison qui semblait échapper à la raison, l'atelier de cellules avions était à cheval sur deux travées celle de la grande porte Warner, et l'autre réservée à l'ajustage.
II est vrai que l'école était plutôt mal dotée en appareils et que le fonctionnement manuel de l'ouverture de la porte ne favorisait pas le mouvement du matériel. Je fis motoriser l'ouverture de la porte et confiai la responsabilité de la section cellule à Mr. BOSSUT aidé de Mr. MOSCHETTI.
L'ajustage s'étendit sur toute la travée N°1. Pour les ateliers moteurs, cellules et électricité avions, j'achetai de l'outillage chrome-vanadium de première qualité; chaque élève recevant, comme dans les AIA, cet outillage personnel à charge pour lui de l'entretenir et de le rendre en fin d'année.
Pour l'outillage général, le magasin central était tenu par Mr. MADRID Marcel, aidé de Mr. CRESTA, les élèves recevaient des jetons qui leur permettaient de sortir l'outillage dont ils avaient besoin : chignoles, tarauds, etc.
L'atelier des machines-outils fut transféré du hangar qui allait devenir salle de conférence jusqu'à la 4ème travée lorsque les 2 transfos de 250 KWA furent installés dans la cabine préparée à cet effet avec le tableau de commande au fond de la travée centrale N°3 (atelier moteurs), et de mon bureau je pouvais voir les ateliers en service.
Pour de supposées économies d'installation, l'alimentation de chaque machine se faisait sur un circuit maillé, système qui me fut imposé mais que je ne recommanderai jamais, surtout dans une école, chaque groupe de machines devant être isolé de l'alimentation électrique en coupant deux, et quelquefois, trois interrupteurs. On fit avec. . .
Travée N°5 - atelier électricité :
Il disposait d'un bureau vitré pour le chef d'atelier.
Dans le fond, une cellule très incomplète d'un LEO 45 servait aux élèves à faire, défaire, et refaire les circuits électriques.
Une tourelle - mitrailleuse Glenn Martin complétait la richesse aéronautique de l'atelier.
Au mur une hélice à pas variable Ratier.
Dirigé par Mr. DURAND et, après son départ, par Mr. LLINARES, cet atelier disposait d'une dizaine de petites forges avec leur batterie d'outillage et d'enclumes car il avait été prévu un stage systématique de 15 jours ou 3 semaines pour tous les élèves de 3ème.
L'efficacité de ce stage ne fut pas prouvée, il perturbait le fonctionnement des ateliers machines-outils et ajustage. Les AIA confirmèrent le peu d'utilité de cette section qui fut démantelée en 1952 et je fis installer une centrale à bouteilles de soudure autogène (en supprimant le générateur à carbure, dangereux et sale) et un poste de soudure à l'argon en plus de la soudure à l'arc.
Une partie de ce bâtiment avait été réservée à un atelier de menuiserie. L'abandon des avions bois, l'existence de nombreux spécialistes encore jeunes en fonction dans les ateliers avaient conduit mon prédécesseur à supprimer cette formation et les stages des 3ème dans la formation initiale.
En 1956 un atelier instruments de bord, y fut installé et confié à Mr. AUROIRE. Il comprenait 10 ou 12 postes de travail (?) avec les appareils de vérification et d'étalonnage nécessaires.
En 1957 ( ou 58 ?), un atelier d'électronique et de radio prit place dans ce bâtiment avec encore 10 ou 12 postes de travail et les appareils de mesure et générateurs nécessaires. Mr. SALAÜN en fut le 1er chef suivi de Mr.GAROT. Le reste du Chaufour Dumez était réservé au laboratoire ( essais de matériaux, métrologie, banc d'essais de puissance Junker, machine à équilibrer).
Un bureau de dessin et le bureau du chef de labo, Mr. LAURENT Jean et son adjoint, Mr. COLANGE, étaient construits au premier étage sur le vestiaire et la salle de tirage de bleus, de photo, et d'essais non destructifs (ressuage, UV).
Au premier étage, une salle de techno, et le bureau du chef d'atelier étaient inexploitables sans arrêter le travail. Je fis insonoriser ces pièces par doubles parois, ce qui apporta un confort non négligeable bien qu'imparfait (1952/53).
L'atelier moteurs d'avions dirigé par Mr. ROUCHON disposait d'un bâtiment pour essais de moteurs (puissance, consommation, etc...) Située au bout du 1er Chaufour Dumez, seule la cabine de mesure était insonorisée, mais les essais n'ont jamais causé de perturbation, les ateliers faisant écran pour les salles de cours très éloignées.
Le moteur utilisé, 6Q Renault, n'étant pas très puissant (450 CV) et aucun essai d'endurance programmé, le bruit signalait le caractère aéronautique de l'école sans produire d'effets néfastes !
En 1957/58 (?), la création d'une section nouvelle: les APPAERO (des élèves munis du CAP ajustage étaient recrutés dans les établissements de l'éducation nationale sur examen de leur scolarité avec le concours de l'inspecteur de l'enseignement technique Mr. TILLIER).
Cette formation assez originale, en une année, permettait de donner une spécialisation aéronautique à des ouvriers ( 5ème cat. ) dont les établissements eurent besoin dans un délai très bref. C'est pour eux qu'un appentis fut construit, symétrique à celui existant pour les vestiaires des élèves.
Pour en terminer avec la construction, c'est en 1958/59 qu'un hangar de 25m X 30m fut édifié derrière l'atelier central. Avec ses portes coulissantes, il permettait d'accueillir des avions de 20 m d'envergure sans avoir à démonter les ailes.
Le sol, bétonné, comportait des fosses en vraie grandeur recouvertes de portes en tôle striée où se trouvaient les prises électriques, l'air comprimé et toute autre servitude à venir.
Ce hangar atelier donnait aux élèves une image d'un atelier de réparation cellules avions en AIA. Il permettait de mettre à l'abri des intempéries les appareils dont j'avais obtenu l'affectation: 4 Kingcobra, 6 T6 et 1 Dakota qui ne fut jamais affecté en raison des événements (1963).
J'avais dans mes cartons les plans d'un banc d'essais pour réacteur Marboré. Pour les mêmes raisons, la construction en fut abandonnée.